Crédit immobilier : faut-il emprunter maintenant ou attendre que la crise politique se calme ?
La démission surprise du Premier ministre Sébastien Lecornu a fait bondir les taux d’emprunt français sur les marchés. Faut-il vite signer son crédit immobilier avant une nouvelle hausse des taux, ou attendre une accalmie ? Des courtiers délivrent leurs conseils.
est un record dont les emprunteurs immobiliers se seraient volontiers passé. Ce lundi 6 octobre, juste après l’annonce de la démission surprise du Premier ministre Sébastien Lecornu, qui avait enfin dévoilé son gouvernement la veille au soir, le taux de l’OAT (obligation assimilable du Trésor) à 10 ans a bondi, à plus de 3,61%, du jamais vu depuis le mois de mars. En début d’après-midi, ce taux, exigé par les investisseurs internationaux pour prêter à la France sur les marchés financiers, s’élevait encore à 3,57%, contre 3,51% vendredi soir.
Cette «pression haussière sur les taux (d’emprunt) français risque d’être accentuée par une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale, que le président de la République pourrait être contraint d’annoncer dans les prochains jours, compte tenu de l’incapacité à trouver un compromis avec les forces en présence à l’Assemblée Nationale».
Un taux à 3,50% en décembre ?
La hausse des taux à 10 ans renchérissant le coût auquel les banques se financent sur les marchés financiers, elles le répercutent sur les taux auxquels elles prêtent à leurs clients, afin de ne pas perdre d’argent. Imaginant une censure du gouvernement Lecornu et une instabilité politique durable, ce qui n’est pas très différent de la crise provoquée par la démission du Premier ministre, le courtier Vousfinancer pronostiquait la semaine dernière de nouvelles hausses des taux d’ici à la fin de l’année. Mais dans des proportions toujours très modérées, qui porteraient le taux moyen des crédits immobiliers sur 20 ans à 3,50% en décembre, contre 3,30% en ce début octobre.
Un taux de 3,50% fin 2025, c’est également le niveau sur lequel mise Jordan Frarier, président de Foncia Transaction, qui s’est exprimé lors d’une conférence de presse, le 2 octobre. «Même si les taux remontent à 3,5% sur 20 ans, je ne vois pas le marché se gripper, le prix d’achat moyen étant de seulement 170 000 euros dans notre réseau», estime le dirigeant. De fait, au taux actuel de 3,30%, emprunter 200 000 euros sur 20 ans nécessite de rembourser 1 139 euros par mois, calcule Vous financer. Un taux de 3,50% porterait ce montant à 1 160 euros, soit une augmentation de seulement 21 euros.
Sécuriser son taux de crédit immobilier
Certes, «l’instabilité politique peut provoquer un léger sursaut des taux souverains français», comme on l’a vu ce lundi, et comme on l’avait constaté également fin août lorsque François Bayrou avait décidé de solliciter un vote de confiance des députés, admet le courtier Cafpi. Mais «les marchés obligataires réagissent souvent à chaud avant de se stabiliser», relativise-t-il. Lui aussi juge donc que cette hausse des taux d’emprunt français «restera limitée, à moins d’une crise durable». Toutefois, «en période d’incertitude, mieux vaut sécuriser son taux de crédit immobilier au plus vite, recommande Caroline Arnould, directrice générale de Cafpi. Le vrai risque, pour les acheteurs, c’est de perdre leur financement». Selon elle, les taux moyens sur 20 ans étant à «un niveau encore attractif, rien ne justifie d’attendre» pour demander un crédit. Une opinion partagée par l’association de courtiers CNCEF Crédit, pour qui «l’erreur serait que, dans ce contexte (d’instabilité politique), les ménages mettent à l’arrêt leurs projets d’achat immobilier». En effet, aujourd’hui, «on peut acheter avec des taux raisonnables et plus attractifs qu’il y a un an, et les banques continuent à prêter», souligne-t-elle. Autant en profiter pour tenter de «devenir propriétaire avant la retraite, un impératif pour 73% des Français», rappelle l’association, citant une étude de l’Institut Montaigne publiée en août dernier. Un besoin que «la précédente ministre du Logement, Valérie Létard, avait bien compris», souligne au passage CNCEF Crédit, «regrettant que le travail qu’elle avait commencé à entreprendre soit mis à l’arrêt».